Au-delà des apparitions

par 7 mars 2024À la une, Art contemporain

Cet hiver, la fondation Louis Vuitton présente dans sa galerie 3 un solo show de Xie Lei. L’artiste chinois nous immerge dans un univers fantasmagorique, peuplé d’apparitions. Véritable voyage au cœur de camaïeux oscillant entre le vert émeraude et le vert de Sèvres, le peintre nous livre l’expression de ses pensées sur l’existence.

Lorsque nous pénétrons dans cet espace, nous sommes soudainement submergés par cinq grands formats. Leur accrochage rapproché s’apparentant à une frise donne la sensation que nous entrons véritablement dans la peinture. Une autre toile, aux dimensions bien plus modestes, vient compléter la série, comme un contrepoint. De la sorte, l’artiste crée une tension formelle entre les tableaux. Face aux toiles monumentales, un mur entièrement recouvert de miroirs martelés évoquant une surface d’eau, accentue le côté immersif de la scénographie. Ainsi, le spectateur plonge dans une autre dimension.

Xie Lei se questionne depuis longtemps sur la représentation du réel. Ici s’opère une prolongation picturale de ses réflexions sur l’existence, la vie, la mort, mais aussi son ambiguïté. La série Au-delà fait notamment référence aux recherches d’Aby Warburg, historien de l’art allemand, et à la notion de « Nachleben », ce qui vient après la mort. Dans son travail, l’artiste matérialise ses interrogations, mais aussi ses souvenirs d’enfance et ses lectures.

Dans Au-delà, la flore est omniprésente. Lorsqu’il arrive à l’atelier, situé à Thiais dans la banlieue parisienne, il instaure un dialogue avec la nature qui l’entoure. Être connecté à son jardin est très important pour lui. Contrairement aux images immédiates, parfois revendicatives, que l’on trouve sur les réseaux sociaux, les créations de l’artiste aspirent au calme et à la réflexion. Il faut du temps pour décanter ses idées et saisir ce qui déclenche son imaginaire

Naviguer entre les mondes, voilà une notion que l’on retrouve dans la série Au-delà. Ici, les branches des arbres se prolongent d’une toile à l’autre, comme si les protagonistes pouvaient errer entre chaque tableau. Le choix d’utiliser un camaïeu de verts presque phosphorescent accentue l’impression irréelle qui émane de cette pièce. Les êtres, dont la silhouette irradiante se fond avec la nature, soulignent la grandeur de cette dernière. Ces apparitions font écho au romantisme, où l’homme s’évapore dans une nature grandiose. De cette manière très personnelle, l’artiste pose une question qui restera en suspens : que deviendrons-nous après ?

Tout comme ses peintures, la vie Xie Lei est riche d’horizons multiples. Né dans la province d’Anhui, l’artiste grandit dans une ville minière. Être artiste a toujours été un rêve pour ce dernier. À 15 ans, il intègre le Collège des beaux-arts de l’Académie Centrale des Beaux-Arts de Pékin. En 2006, grâce au soutien de ses parents, tous deux mineurs, il intègre l’Académie Beaux-Arts de Paris dont il sort diplômé d’un master en 2010, puis poursuit ses études au Royal Collège of Art de Londres. En 2016, il obtient un doctorat en art visuel à l’Académie Beaux-Arts de Paris.

A découvrir jusqu’au 2 avril 2024 à la Fondation Louis Vuitton

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