Héroïnes cosmiques

par 5 septembre 2022Art contemporain

Caroline Tschumi couche sur le papier ses visions hallucinées peuplées de figures féminines et de sublimes créatures. Tantôt tourmentés, tantôt oniriques, ses dessins reflètent son fort intérieur de manière poétique. Dans une foison de couleurs vives, l’artiste nous narre ses impressions tel un conte moderne dont les mots se muent en images. 

 

Comme beaucoup d’artistes, Caroline Tschumi dessine quotidiennement depuis sa plus tendre enfance. De manière instinctive, elle matérialise sur le papier le fruit de son imagination. Ses illustrations se construisent autour d’un personnage principal, généralement une femme, et évoluent au cours de son avancement. Bien que l’artiste se dit être inconsciente quant à sa signification, le cheval s’avère être un symbole récurrent dans son œuvre. Représente-t-il l’élan, la fouge, ou évoque-t-il chez elle des souvenirs rassurants. Sa présence se détache complètement de sa symbolique iconographique occidentale habituelle. Dans son enfance, l’artiste avait pour coutume de dessiner des cheveux, mais aussi des protagonistes issus des mangas qu’elle affectionnait tout particulièrement. Le personnage de Sailor Moon l’a particulièrement marqué par sa féminité et sa sensualité à couper le souffle, mais aussi par la puissance émanant d’elle. On retrouve d’ailleurs des airs de cette héroïne nippone dans les femmes de Caroline Tschumi, en particulier dans La mer ne peut pas pencher (2022). Bien entendu, l’artiste se projette un peu dans chaque esquisse et chaque personnage. Elle avoue d’ailleurs dessiner des femmes car elle en est une, ses dessins reflétant son univers personnel.

La mer ne peut pas pencher, 2022
Accélérateur de particules, 2022

Le milieu où évolue l’artiste s’invite parfois dans ses œuvres. C’est le cas dans Accélérateur de particules (2022), où la femme suspendue dans le cosmos écarte les nuages d’où des chevaux en sortent par dizaines. Dans un élan équin, les destriers forment un cercle autour d’elle et risquent d’entrer en collision. Cet impact évoque alors à l’artiste le LHC du CERN. Ainsi, elle décide d’ajouter une planète aux motifs psychédéliques. Elle a choisi volontairement de ne pas cerner de noir cet astre afin de créer un effet de profondeur, de la même façon que les motifs de la jupe de la danseuse de Ce n’est pas moi, ce sont les yeux (2022). Parfois la technique évolue au cours du dessin. Caroline Tschumi dit ne pas tester avant de dessiner, cependant elle maîtrise parfaitement les stylos feutres comme en témoignent le Leporello datant de ses études aux beaux-arts. 

Parfois, c’est l’actualité qui influence l’artiste. Son atelier étant orienté plein Sud, elle a particulièrement souffert de la canicule cet été, ce qui l’a sans doute mené à introduire des flammes dans Ce n’est pas moi, ce sont les yeux. Ses œuvres fonctionnent un peu comme un journal à la fois personnel et universel. Caroline Tschumi compose entre différentes influences qui vont de Walt Disney au manga, du rock psychédélique à la mythologie gréco-romaine. Il s’agit plutôt d’un ressenti et non d’un concept bien défini. Souvent, elle ne sait pas à quoi va ressembler son dessin avant de le terminer. Telle une métaphore de son quotidien, elle capte les énergies et l’atmosphère qui l’entourent afin de les transformer en une image dynamique dont chaque détail a son importance. 

Jusqu’au 25 octobre à la galerie Analix Forever.

Ce n’est pas moi, ce sont les yeux, 2022
Sans titre, 2022

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