Alchimie invisible

par 17 avril 2019Art contemporain

Les pigments naturels sont à l’honneur dans Transparences, la dernière exposition de la galerie ArtDynasty. Les oeuvres de Chantal Carrel dont la couleur est encapsulée dans de la biorésine font écho aux toiles et aux sculptures en cristaux de sel de Silvana Solivella. Ode au monde minéral et végétal.

Les oeuvres des deux artistes qui, toutes deux, affectionnent particulièrement les matières naturelles se côtoient dans une symbiose harmonieuse. Chez Chantal Carrel, elles sont prisonnières d’une résine naturelle que l’artiste fabrique à base de sucre. Cette résine est appliquée sur des panneaux en plexiglas puis les pigments viennent la colorer. Leurs provenances sont diverses, elles vont de la betterave rouge au curcuma. Dans une abstraction organique, ces nuances créent un jeu de lumière se projetant au mur.
Variation au cube, 2016.
On peut admirer d’autres reflets sur le mur avec Variation au cube (2016), une série de trois cubes composés de fragments de verre acrylique. Leurs ombres leur donnent une dimension architecturale, prolongeant ainsi leur existence au delà de l’oeuvre elle-même. Ces sculptures évoquent aussi la structure moléculaire des gemmes.

Cette allusion au monde minéral se poursuit dans les Larmes de sel et les Noeuds de sel de Silvana Solivella. Des petits cristaux de sel parent délicatement une structure métallique. La pureté de leur blanc et la manière dont ils réfléchissent la lumière insufflent un sentiment de grâce et de pureté, évoquant la fraîcheur de la neige qui vient de tomber.

Cette poésie hivernale se prolonge avec l’installation suivante: des sphères en verre soufflé agrippées au mur dans lesquelles s’agglomèrent parfois des cristaux de sel. Plus loin, une autre bulle posée sur un socle renferme hermétiquement des cristaux de sel dressés telle une stalagmite. Le verre sert d’écrin, les préservant de l’humidité et de l’oxydation, comme si le temps s’était arrêté. L’aspect de ces créations, avec leurs reflets holographiques, est à l’image de bulles de savon que l’on aurait soufflé et qui seraient devenues éternelles, comme pour évoquer la matérialisation d’un plaisir éphémère, la cristallisation de l’impossible.

Installation en verre et sel soufflé, 2019.
ST, 2017 et Noeud de sel, 2019.
Silvana Solivella utilise aussi des pigments naturels pour ses toiles. Sur des fonds aux teintes froides tombent les branches de saules pleureurs. Dans une abstraction végétale, celles-ci rythment la composition, créant ainsi une douce mélodie picturale.
En mélangeant l’univers de ces deux artistes, ce nouvel accrochage rend hommage à la beauté insoupçonnée de minéraux domestiques comme le sel et le sucre, mais aussi au monde végétal.

Transparences
A découvrir jusqu’au 13 juillet à la galerie ArtDynasty
Grand-Rue 23
1204 Genève
+41 22 310 21 03

http://artdynasty.ch/

Partagez cet article:

Plus d’articles

Étendre le champ des possibles

Étendre le champ des possibles

L’artiste américaine Christina Quarles réinvente le corps, gardant l’essentiel, gommant son appartenance à un genre ou à un groupe ethnique. Dans un ballet de techniques mixtes, les protagonistes interagissent entre eux et créent une dynamique traduisant leurs émotions. Cette scénographie dépasse les limites des stéréotypes dans lesquels on enferme bien trop souvent les individus.

Pat Noser et Yannick Lambelet ou l’art de la peinture épistolaire

Pat Noser et Yannick Lambelet ou l’art de la peinture épistolaire

Entre la Suisse alémanique et la Suisse romande se situe une zone commune: j’ai nommé la peinture contemporaine. Souvent occultée par le design, elle efface Röstigraben, réunissant le monde sous ses formes les plus diverses. En effet, il existe une scène artistique helvétique qui mériterait plus d’attention. Dans une correspondance picturale inédite, les artistes Pat Noser et Yannick Lambelet ont su tisser des liens entre deux générations.

From Ashes to Dust

From Ashes to Dust

Pour cette rentrée caniculaire, la galerie andata ritorno est heureuse de présenter From Ashes to Dust, la nouvelle exposition personnelle de Christine Boillat. Ses mystérieux paysages dessinés au fusain augurent une catastrophe naturelle sans précédent. Dans une atmosphère à la fois irréelle et tangible, l’artiste nous plonge dans une féérie funeste.